mardi 2 novembre 2010

La liberté d'expression face à l'incitation à la haine (droit franco-russe) par Ksenia Nekhorocheva

La liberté d'expression face à l'incitation à la haine (droit franco-russe) par Ksenia Nekhorocheva. Exercice transmis et publié dans le cadre du contrôle continu de dernière année au Collège Universitaire français de Moscou.






Ksenia Nekhorocheva-Liberte d'Expression





Matthieu Escande
Posté par :


Matthieu ESCANDE
Enseignant-Chercheur en Droit Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne 
Détaché au Collège Universitaire français de Moscou/MGU 
Doctorant en Droit Université de Toulouse I 
Institut de Recherche en Droit Européen, International et Comparé

20 commentaires:

  1. Ksenia, c'est Tatiana Shulga-Morskaya. Merci bcp pour ton travail, je l'ai lu avec vif interet! D'abord, j'aime ton style, il est tres captivant. En plus, je pense que le theme aborde est vraiment passionnant! Moi, je suis plutot d'avis qu'il ne faut pas provoquer comme ca, non seulement il n'y a pas de sens pratique, tout simplement un acte de voyoutisme, mais aussi ca peut etre tres dangereux ce qui montre l'exemple de Theo van Gogh. Bien sur, ce ne justifie pas du tout l'assasinat mais, selon moi, dans ce crime la victime est aussi coupable que le criminel. Quant aux limites de liberte d'expression, peut-etre tu es au courant de la pratique americaine? J'ai entendu parler qu'aux Etats-Unis les cas d'encadrement de cette liberte sont vraiment extraordinaires...

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  2. Bonjour Ksenia !

    Ici Eugénie Pavlenko. J`ai aimé ton travail dont le titre m`a paru captivant. Et j`ai une petite question à propos de la liberté d`expression : une telle pratique où les uns incitent à la haine, les autres vengent n`est-t-elle pas de l`esprit terroriste et parait-il pertinent de créer fâce à cette tendance dangereuse des règles nouvelles approprier à ce sujet?

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  3. Salut, Ksenia,

    Merci pour ta dissertation.

    Même si au niveau international il n'y a pas de restrictions pareilles à la liberté d'expression, en Russie, par exemple, le législateur les a prévues dans notre Constitution. En vertu de l'art. 29 al 2: "2. Est interdite la propagande ou l'agitation incitant à la haine et à l'hostilité sociale, raciale, nationale ou religieuse. Est interdite la propagande relative à la supériorité sociale, raciale, nationale, religieuse ou linguistique".

    Donc, si ces restrictions éxistent au niveau national, leur éxistance au niveau international, n'est-elle pas superflue...

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  4. Tatiana et Eugénie , merci beaucoup de vos questions et de vos commentaires !

    A Tatiana – A vrai dire, je n’étais pas au courant de la pratique améraicaine differe beaucoup de celle de l’Europe. J’ai fait une petite recherche, mais je n’ai trouvé rien d’extraordinaire. J’ai lu plusieurs articles sur une affaire qui a fait du bruit en 2007 et qui concerne la pertubation d’une cérémonie d’obsèque d’un soldat américain qui est mort en Iraq (tout court sur http://fr.altermedia.info/general/usa-quelles-limites-a-la-liberte-dexpression_12238.html), mais la décision de la Cour ainsi que les arguments des juristes et des avocats à ce propos m’ont convaicu qu’il n’y a rien qui sorte de l’ordinaire aux Etats-Unis.
    Par contre, je sais que le droit à la vie privée est beaucoup moins protégé aux Etats-Unis qu’en Europe apres les attentas terrorstes du 11 septembre 2001.
    Mais, si tu connais mieux la situation aux Etats-Unis concernant cette liberté, ce serais vraiment tres intéressant de t’écouter !!!
    A Eugénie – d’un coté, je suis d’accord avec toi que dans un monde moderne ou les representants plusieurs cultures et traditions vivent enseble, tres étroitement liés, nous avons besoin d’adopter des normes nouvelles, qui régissent la liberté d’expression dans des conditions changées, par exemple en priviligiant le droit a la vie privée. Mais, d’autre part, nous riquons de limiter une liberté que nous avons aquis avec tant de lutte, et qui est une des valeurs fondamentales. Malheureusement, le debat autour de la liberte d’expression et ses limites est un debat eternel ! A mon avis, nous pouvons au moins décider mêmes laquelle des libértés est plus importante pour nous dans une telle ou telle condition.
    Pour conclure, je voudrais citer notre professeur de droit constitutionnel a l’Université que ‘avais terminée. En se referant a 11.09.2001, il a dit que les Americains ont sacrifié leur droit a la vie, en se réfusant de limiter leur droit a la vie privée. Un peu cynique, peut-être, et contestable, bien sur. Mais cela laisse a réfléchir.

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  5. Bonjour Ksenia,
    Si j’ai bien compris la situation, la liberté d’expression à la française inclut la liberté de parler, d’écrire et d’imprimer les pensées et les opinions (art.11 de DDHC de 1789) tandis que la version américaine comprend aussi la liberté d’exprimer les opinions par l’action (ça vient de la jurisprudence de la Cour Suprême qui a affirmé, par exemple, qu’un homme qui avait brûlé le drapeau américain en protestant contre la guerre au Viêt-nam l’a fait de plein droit).
    Tatiana Shulga-Morskaya

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  7. Pardon, ma réponse s’est averée si longue, que même le système a été troublée par sa dimesion et n’a pas voulu enregistrer le commentaire entier, c’est pour cela que je le publie par partie.

    Tanya, merci beaucoup de ta question et ta réponse !!! J’ai fait une petite recherche à ce sujet avec un grand plaisir et inspiration=)(je ne connaissais pas la réponse avant =)
    1) En effet, la liberté d’expression aux Etats-Unis comprend la l’opinion exprimée par action, on appelle très souvent cette liberté un liberté symbolique ou liberté non-vérbale. Je n’irais pas en détails parce que cette libertépeut être un sujet de toute une dissertation ou bien mémoire. Je vais seulement noter que cette extention de liberté d’expression a été évoquée dans la décision de la Cour Suprême très célèbre - United States v. O'Brien, 391 U.S. 367 1968. – Je cite l’arrêt - «freedom of expression which the First Amendment guarantees includes all modes of "communication of ideas by conduct," and that his conduct is within this definition because he did it in "demonstration against the war and against the draft"» (http://supreme.justia.com/us/391/367/case.html#375)

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  8. 2) Quand même il est à noter que M. O'Brien, qui a brûlé sa plaque de registration, n’a pas gagné le procès. Tout d’abord, il est à noter que la cour fixe tout de suite une restriction à la liberté étendue – «We cannot accept the view that an apparently limitless variety of conduct can be labeled "speech" whenever the person engaging in the conduct intends thereby to express an idea». En effet, il devient évident qu’il est tout à fait impossible de juger toute action comme expression d’opinion, donc, ll’extention de liberté dépend des circonstances, a dit la cour. Et de quelles circonstances dépend-elle ? Si on lit plus bas, on va comprendre comment la cour règle cette situation – «This Court has held that, when "speech" and "nonspeech" elements are combined in the same course of conduct, a sufficiently important governmental interest in regulating the nonspeech element can justify incidental limitations on First Amendment freedoms». Donc, les elements verbaux et non-verbaux sont impliqués, c’est l’intérêt de l’Etat qui devient un facteur décisif ! Dans la situation avec O'Brien la cour a decide que l’intérêt de l’Etat (ou gouvernement, parce que la cour a dit «governmetn inerest») a été supérieur – «The governmental interest and the scope of the 1965 Amendment are limited to preventing harm to the smooth and efficient functioning of the Selective Service System. When O'Brien deliberately rendered unavailable his registration certificate, he willfully frustrated this governmental interest. For this noncommunicative impact of his conduct, and for nothing else, he was convicted». Cela veut dire que O'Brien a frustré l’Intérêt de l’Etat, en violant les règments militaires, lui a empêché d’exercuter son obligation de pouvoir soulever l'armée rapidement. Il y a eu d’autre question soulevées, telles que, par exemplele fait que la plaque elle même n’a pas de sens, parce que tous les soldats sont inclus des registres où sont marqués leurs numéros, mais la cour a refuté cet argument, évoqué par le défendeur (on peut lire le texte complet de l’arrêt sur - http://supreme.justia.com/us/391/367/case.html#375)

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  9. 2) Quand même il est à noter que M. O'Brien, qui a brûlé sa plaque de registration, n’a pas gagné le procès. Tout d’abord, il est à noter que la cour fixe tout de suite une restriction à la liberté étendue – «We cannot accept the view that an apparently limitless variety of conduct can be labeled "speech" whenever the person engaging in the conduct intends thereby to express an idea». En effet, il devient évident qu’il est tout à fait impossible de juger toute action comme expression d’opinion, donc, ll’extention de liberté dépend des circonstances, a dit la cour. Et de quelles circonstances dépend-elle ? Si on lit plus bas, on va comprendre comment la cour règle cette situation – «This Court has held that, when "speech" and "nonspeech" elements are combined in the same course of conduct, a sufficiently important governmental interest in regulating the nonspeech element can justify incidental limitations on First Amendment freedoms». Donc, les elements verbaux et non-verbaux sont impliqués, c’est l’intérêt de l’Etat qui devient un facteur décisif ! Dans la situation avec O'Brien la cour a decide que l’intérêt de l’Etat (ou gouvernement, parce que la cour a dit «governmetn inerest») a été supérieur – «The governmental interest and the scope of the 1965 Amendment are limited to preventing harm to the smooth and efficient functioning of the Selective Service System. When O'Brien deliberately rendered unavailable his registration certificate, he willfully frustrated this governmental interest. For this noncommunicative impact of his conduct, and for nothing else, he was convicted». Cela veut dire que O'Brien a frustré l’Intérêt de l’Etat, en violant les règments militaires, lui a empêché d’exercuter son obligation de pouvoir soulever l'armée rapidement. Il y a eu d’autre question soulevées, telles que, par exemplele fait que la plaque elle même n’a pas de sens, parce que tous les soldats sont inclus des registres où sont marqués leurs numéros, mais la cour a refuté cet argument, évoqué par le défendeur (on peut lire le texte complet de l’arrêt sur - http://supreme.justia.com/us/391/367/case.html#375)

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  10. 2) Quand même il est à noter que M. O'Brien, qui a brûlé sa plaque de registration, n’a pas gagné le procès. Tout d’abord, il est à noter que la cour fixe tout de suite une restriction à la liberté étendue – «We cannot accept the view that an apparently limitless variety of conduct can be labeled "speech" whenever the person engaging in the conduct intends thereby to express an idea». En effet, il devient évident qu’il est tout à fait impossible de juger toute action comme expression d’opinion, donc, ll’extention de liberté dépend des circonstances, a dit la cour. Et de quelles circonstances dépend-elle ? Si on lit plus bas, on va comprendre comment la cour règle cette situation – «This Court has held that, when "speech" and "nonspeech" elements are combined in the same course of conduct, a sufficiently important governmental interest in regulating the nonspeech element can justify incidental limitations on First Amendment freedoms». Donc, les elements verbaux et non-verbaux sont impliqués, c’est l’intérêt de l’Etat qui devient un facteur décisif !

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  11. Dans la situation avec O'Brien la cour a decide que l’intérêt de l’Etat (ou gouvernement, parce que la cour a dit «governmetn inerest») a été supérieur – «The governmental interest and the scope of the 1965 Amendment are limited to preventing harm to the smooth and efficient functioning of the Selective Service System. When O'Brien deliberately rendered unavailable his registration certificate, he willfully frustrated this governmental interest. For this noncommunicative impact of his conduct, and for nothing else, he was convicted». Cela veut dire que O'Brien a frustré l’Intérêt de l’Etat, en violant les règments militaires, lui a empêché d’exercuter son obligation de pouvoir soulever l'armée rapidement. Il y a eu d’autre question soulevées, telles que, par exemplele fait que la plaque elle même n’a pas de sens, parce que tous les soldats sont inclus des registres où sont marqués leurs numéros, mais la cour a refuté cet argument, évoqué par le défendeur (on peut lire le texte complet de l’arrêt sur - http://supreme.justia.com/us/391/367/case.html#375)

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  12. 3) Il est à noter que la question de drapeau (ou quelque marque liées avec l’execution dг pouvoir souverain de l’Etat) est une question sensible pour un Etat. Dans plusieurs Etats il est defend par l’Etat de le brûler ou altérer. Par exemple, brûler le drapeau français est defendu par l’article 433-5-1 du Code pénal. L’incrimination existe dans de nombreux pays. Le droit pénal allemand incrimine l’outrage au drapeau national, mais aussi l’outrage à l’encontre d’un drapeau étranger. L’Italie connait un régime proche des règles française : seule protection des emblèmes nationaux, mais le débat sur la dépénalisation a été ouvert, lorsque ces actes sont considérées comme «expression symbolique».

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  13. 4) Enfin, pour la Cour de Strasbourg, la liberté d'expression, protégée par l'article 10 de la Convention des doits de l’homme, « vaut non seulement pour les informations ou les idées accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l'Etat ou une fraction de la population » (CEDH, 7 décembre 1976 Handyside, § 49). Donc, la décision de la Cour européenne aurait pu être différente si O'Brien avait été jugé à Strasbourg.

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  14. Bonjour Ksenia,

    Ta recherche m'a sensibilisé ))) et j'ai trouvé les décisions dont j'ai parlé:
    http://en.wikipedia.org/wiki/Texas_v._Johnson
    http://en.wikipedia.org/wiki/Street_v._New_York

    Tatiana Shulga-Morskaya

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  15. Bonjour, Ksenia!
    Je m'intresse comment la Cour Européenne des Droits de l'Homme arbitre deux principes opposées - le droit à l'expression libre et l'interdiction de la propagande de la haine? (Est-ce qu'il y a la formulation fixé ou le juge se référe au cas individuel)?
    Merci par avance,
    Anna Kirillova

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  16. A Tatiana – merci pour ses affaires et ta remarque=))) Là oui , tu as raison, dans les affaires indiquées la Cour a invoqué l’expression par action, ou l’action expressive, pour acquitter des accusés.
    J’ai analysé d’abord l’affaire O’Brien, parce que c’étrait lui qui a protesté contre la guerre en Viêt-Nam.

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  17. Anna, merci beaucoup de ta question !!!
    Malheureusement, il n’existe pas de définition «l’incitation à la haine»ou «discour de haine» dans la Convetion, la Cour n’en ait jamais donné de défnition précise non plus.
    Parmi les limites, posées à la liberté d’expression on ne trouve pas l’incitation à la haine non plus (Je cite article 10 § 2, concernant les limites: « L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire. »)
    La seule decision qu’on cite partout à ce propos c’est la decision de Handyside. La Cour a dit dans cet arrêt que la liberté d'expression, protégée par l'article 10 de la Convention des doits de l’homme, « vaut non seulement pour les informations ou les idées accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l'Etat ou une fraction de la population » (CEDH, 7 décembre 1976 Handyside, § 49). Ainsi, on peut dire, que la Cour met en priorité la liberté d’expression.
    Certes, cette position est bien explicable. Je voudrais attirer une attention particulière au fait que l’identifcation d’actes qui peuvent être qualifés d’ «incitant à la haine» est très difcile parce que ce type de discours n’implique pas nécessairement l’expression d’une «haine» ou d’émotions. Le discours de haine peut se dissimuler sous des déclarations qui, à première vue, paraissent rationnelles ou normales, comme celles de Théo Van Gogh (le réalisateur, dont l’histoire est racontée au début de la dissertation), par exemple. Il ne voulait pas exprimer sa haine des musulmans, il était un provocateur tout simplement, il offendait les représetants de toutes les religions. Mais, cela, c’est une partie de la notion de démocratie, des minorités et l’opposition aux idées universellement admises doivent toujours exister dans une société démocratique. N’est-ce pas une idée qu’on nous apprend dans les sciences humaines (surtout dans les sciences juridiques, sociales ou politiques)?
    Donc, on peut dire que c’est une lacune juridique, quand même, on voit bien que le fait est explicable.

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